Amelie Marie In Tokyo

Apprendre une langue étrangère, c’est ouvrir son esprit au monde

Donner le goût et l’envie d’apprendre une langue étrangère doit se faire dès l’enfance

C’est avec chaleur que je me remémore mes petits cahiers d’anglais rédigés à partir des livres de la médiathèque où j’allais avec ma mère tous les mercredis. À l’époque, je pense que je ne comprenais pas exactement la signification de ces mots étranges. Simplement mon plus grand plaisir était d’écouter les K7, puis les CD, associés. La comptine de la fée mélodie, apprendre à compter avec Mickey. Voilà mes premiers pas dans l’univers anglophone.

Puis, à l’école primaire, je faisais partie d’une classe d’expérimentation pédagogique. Premièrement, mon année de CE2 était égrenée de petits enseignements d’allemand. Puis, durant le CM1, nous apprenions l’espagnol le vendredi après-midi.

Seule impression durable de l’époque, gato chez les hispaniques signifie chat. Cela m’avait bien fait rire. Enfin, le CM2 est l’année du changement. En effet, l’anglais remplace le castillan. Cette fois l’enseignement est accompagné d’un peu plus de structure. Le peu de substance des enseignements ne m’aura pas marquée. Je ne fais même pas le rapprochement avec mes cahiers des expériences médiathèque. Cependant, c’est un moment privilégié en classe, sans pression et agréable.

Le collège, c’est l’âge sérieux de l’apprentissage d’une langue étrangère

Si j’ose dire, ces 4 années sont critiques dans l’amour qu’un enfant peut développer à communiquer dans une langue autre que sa langue maternelle. C’est aussi une course d’endurance pour des gamins qui, s’ils se prennent une sacrée gamelle, se remettront difficilement du retard accumulé. Et du dégout né de celui-ci.

langue étrangère

A priori, je commençais avec des casseroles en ce qui concerne l’anglais. Déjà, mon professeur de l’époque me terrifiait. Des rumeurs de lancer de poubelle à travers la classe circulaient dans le bahut. Ensuite, son regard perçant me clouait sur place lorsqu’il se posait sur ma personne. J’avais de plus la chance inouïe d’être au deuxième rang, à gauche, pile en face de son bureau. Autant dire un canard dans un champ de tir.

Malgré tous mes efforts, je n’arrivais pas à atteindre ses attentes. Mes oreilles sifflaient à chaque devoir sur table. Le latin me semblait à côté être une bénédiction. J’applique soigneusement les règle et j’apprend mes tables. Enfin, je n’ai pas à me débattre avec un accent qui requière de tenir une tasse de thé, le petit doigt en l’air.

Deux années plus tard, le lanceur de poubelle parti en dépression, je m’éveillais (enfin) en anglais. La côte de popularité du latin prendra un sacré plomb dans l’aile, parce que bon, Gladiateur c’est en anglais.

On peut (tout à fait) apprendre plusieurs langues étrangères à la fois

En seconde langue, je commençais à apprendre le russe. En effet, j’avais le choix (cornélien) entre les cours d’italien (90% de filles), d’espagnol (70% de l’établissement), d’allemand (quelques malheureux dont les parents sont encore persuadés qu’une bonne éducation passe par la maîtrise du guten morgen) et enfin de russe. Soit genre 30 gamins sur les 500 de l’établissement, toute année confondue. C’est le russe qui l’emporta.

C’était à la fois par attirance, à la fois par stratégie. Avec si peu d’élèves par classe, j’avais la certitude de ne plus vivre l’humiliante participation orale devant 30 petits couillons hilares. Alors je découvris alors le bonheur que la communication dans une langue étrangère apportait. Accès à plus de livres, communication codée (mon professeur de mathématiques doit encore me maudire pour tous les mots interceptés en classe), découverte de groupes de musique étrangers dont on peu comprendre les lyrics… Et puis la frime, bien entendu.

Ce n’est pas grave d’oublier ce que l’on apprend. L’essentiel, c’est d’apprendre !

Ce fut le début d’une histoire d’amour pour les langues étrangères. Dès le lycée, je me mets à apprendre l’espagnol (pour lequel je ne garde que mon affection émerveillée). Je tentais de me lier d’amitié avec les germanophones (mais la vue de leur livre de travail me fit renoncer). Enfin, je me mis au Japonais. En cours de philosophie bien sûr, parce que bon, la philo c’était sympa. Mais il fallait que je m’occupe. D’ailleurs, ce fut longtemps un parcours semé d’échec. À peine je maitrisais le système d’écriture nippon, que j’abandonnais lâchement.

… Apprendre en autodidacte vaut mieux que d’attendre des cours servis sur un plateau d’argent.

L’université fut une déception sans faille concernant les langues étrangères. Malgré les promesses d’accès aux cours de la faculté de langue, cela se révélait impraticable. L’anglais en classe est médiocre, conséquence de l’inégalité de niveau des étudiants. Du coup, je potasse en autodidacte. Par ailleurs, je rafraichis mon russe de temps en temps, je lis en anglais, j’achète des méthodes de langue au gré de mes envies.

Partir à l’étranger est une bonne option !

Grâce à mon université, je suis partie en Turquie pour quelques mois dans le cadre d’un échange Socrate. Ma méthode Assimil en main, j’étais convaincue d’un apprentissage rapide de la belle langue turc. Aujourd’hui encore je suis malheureuse de n’avoir pu en garder quelques traces. Néanmoins j’ai un très bon souvenir de mes contacts avec les gens à Istanbul et du plaisir que l’on a à baragouiner.

Puis, je me suis un temps intéressée au Moyen Orient et ai opté pour apprendre l’arabe. Je reprends le chemin d’une licence de langue. Avant de déguerpir en courant. Les jeunes étudiants de première année de licence, totalement désintéressés, faisaient un bordel monstre dans l’amphi. D’ailleurs, beaucoup d’adultes qui se trouvaient avec moi lachèrent l’affaire, désespérés de pouvoir suivre.

Je me suis alors dit que tant qu’à faire d’être libre, d’avoir mon diplôme en poche et encore quelques mois avant de chercher un travail, autant partir. Et je me suis envolée pour Moscou. Je m’y suis retrouvée dans un melting pot fascinant. Chinois, autrichiens, bulgares, polonais, coréen, japonais… Dans les couloirs de ma résidence, c’est un chaos linguistique absolu : ça crie et communique dans toutes les langues possibles. L’auberge espagnol à 1000 personnes.

S’ouvrir aux autres et s’enrichir

C’est dans cette ambiance que j’ai tiré les meilleurs enseignement de ma vie. Certes, je n’ai peut-être pas progressé en russe tant que cela. Mais j’y ai appris qu’avoir des brides de différentes langues étrangères est suffisant pour nous enrichir culturellement et pour communiquer. Cela pousse à oser, à abandonner ses préjugés. On connait mieux l’autre, et l’on se connait mieux soi-même.

Une langue n’est pas seulement un outil, un mode de communication, c’est une vision du monde. Parce qu’on n’envisage pas le monde de la même manière en Asie, en Europe ou en Amérique Latine, le sens n’est pas le même. Une traduction sans la culture, sans l’échange avec l’autre ne vous apportera rien. Elle sera, au pire erronée, au mieux incomplète.

Et aujourd’hui ?

J’avoue, je rêve d’apprendre le chinois ainsi que le coréen. Vivant en Asie, cela me semble plus accessible et lentement, mais sûrement, je me motive à reprendre mes cahiers pour enrichir une fois de plus, ma vision du monde.

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