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Mes premières impressions et expériences de ma vie à Tachkent, en Ouzbékistan

Tachkent, enfin.

Je sors finalement de la zone de contrôle, pour me retrouver sous un soleil de plomb, entourée subitement de chauffeurs de taxi qui me hèlent. Le ciel est azuré, sans même une brise, je sens la chaleur lourde de cette fin d’automne qui me caresse le visage. Je compte peu d’étrangers à l’arrivée, et je m’extirpe avec peine du groupe d’Ouzbeks qui m’entourent avec passion, m’interpellant en criant des destinations et des tarifs auxquels je ne comprends rien. Incompréhension qui perdurera bien des semaines.

Ouf, sauvée

Enfin, je croise le regard attendu. Je m’avance bagage en main, vers cette énigme qu’est mon copain japonais. Un chauffeur de taxi zélé voit sa ténacité récompensée. On le hèle, il hisse ma valise bleue, qui depuis a achevé ses jours à Tokyo. Nous voilà partis pour le centre même de Tachkent, à deux pas de la place d’Amir Timur.

Nous descendons de notre véhicule poussiéreux, le long d’un trottoir en piteux état. Les arbres s’ils portent des feuilles, me semblent secs et décharnés. De l’herbe pousse ici et là, dans les craquelures du sol. Les murs de la barre d’immeuble qui me fait face sont sales, leur couleur ocre palie par les intempéries du climat Ouzbek.

Nous traversons cette barre via un petit passage – je constaterai que cette architecture massive, soviétique, fait appel à cette astuce permettant de ne pas avoir à contourner les immeubles de taille souvent imposante. Nous passons devant des garages de couleur vert bouteille, numérotés en russe. Des affichettes sont collées ça et là, avec des numéros de téléphones, parfois déchirées, au contenu illisible.

Je vis au ц 1 дом 2 квартира 36. Quartier 1, maison 2, appartement 36.

Pas de nom, pas de boite aux lettres. L’immeuble en brique rouge a meilleure allure de l’extérieur, que la plupart des bâtiments environnants. Cependant le couloir ne paye pas de mine. Mais 3 étages plus haut, l’appartement que j’aurai la chance d’occuper s’avère être confortable. Voire même luxueux si l’on prend en considération le niveau de vie du pays.

Rénové, au parquet ancien qui sent bon la cire, avec ses grands tapis rouges orientaux, les 4 pièces de l’appartement 36 restent dans ma mémoire, inondées du soleil de fin d’après midi, alors même que la neige s’amasse au rebord des fenêtres.

La télévision du salon permet de visionner des programmes russes. Mais l’antenne capricieuse nous plantera bien souvent au beau milieu d’un film. Chose précieuse pour ce pays, nous avons une clef Wi-Fi. Au caractère bien trempé elle aussi. Elle offre l’accès au réseau que si nous l’alimentons régulièrement en Som, monnaie locale et totalement dévaluée.

Tachkent, cette ville aux airs soviétiques

Les avenues sont immenses, à la mode moscovite. Tout comme ces blocs d’immeubles interminables, labyrinthiques presque. L’orient respire à travers des étrangetés architecturales, des balcons ondulés, des décors chaleureux et des fenêtres étrangement découpées.

Il fait très chaud. Malgré ma fatigue, me voilà en promenade sur la place d’Amir Timur. De Tachkent, je ne saurais trop où situer son centre. À vrai dire, je n’arrive pas à parler de cette ville en tant qu’unité. Elle est, pour moi, un patchwork de lieux qu’il m’aura été donné de traverser, de voir.

Ses bazars qui se révèlent être des points cardinaux, ses grands parcs, ses quelques vestiges monumentaux, traces d’un passé glorieux. Tachkent, c’était l’une des plus grandes villes de l’Asie Centrale, à travers laquelle passaient la Route de la Soie et la plupart des itinéraires commerciaux de la région.

J’y observe une jeunesse dorée, qui flâne sur les allées ensoleillées de la place. Des jeunes filles hilares passent près de nous, le regard curieux, attiré sans doute, par la mixité de notre duo. Ce quartier comprend plusieurs universités, dont la faculté de droit, un espace commercial, avec un cinéma, des magasins occidentaux que l’on serait bien en peine d’éviter désormais, tant la mondialisation fait bien son œuvre.

En s’engageant sur l’un des axes qui mènent à la statue d’Amir Timur, on peut observer des musiciens s’entrainant assis sur un banc, des étudiants en art, qui vendent leurs œuvres au milieu d’une brocante à même le sol. Bijoux, tableaux – à la maladresse parfois touchante, le plus souvent hideux, dessins, souvenirs, de bric et de broc, dont des antiquités soviétiques qui attireraient sans doute, plus d’un collectionneur.

J’ai ainsi des souvenirs d’une Tachkent mordorée, où les couleurs de l’été sont concurrencées par l’automne, où la poussière couvre le sol chaud.

Mais l’occasion d’en profiter, déjà, file au loin, tant les difficultés de l’expatriation se révèlent fourbes, épuisantes, multiples.

Car l’Ouzbékistan ne s’apprivoise pas si facilement, il ne s’offrira pas au voyageur ignorant. Il faut avoir la patience, l’amour du voyage, la tolérance nécessaire à cette épreuve qu’est la confrontation entre Occident et Asie. Ce sont des détails en premier qui vous minent :

« Oubliez les ceintures de sécurité, tant qu’à faire, oubliez les passages piétons. J’ai décidé de ne pas traverser de rue, ce qui jusqu’ici, me condamne à faire des détours jusqu’aux rares passages souterrains. Ils vous écraseront sans hésitation, j’en suis certaine, je l’ai vécu à un cheveu près ».

« Oubliez la bonne nourriture… le yaourt se vend à l’unité, les conserves des pays de l’est ne me rassurent pas, pas moyen de trouver des pâtes valables, je trouve des cailloux dans les packs de riz ».

À peine acclimatée que le voisin tambourine, tel un fou furieux, à notre porte. Premier problème de plomberie : l’eau chaude coule, ou ne coule pas. C’est selon son bon vouloir. Les pannes d’électricité sont hebdomadaires. Le chauffage est resté communautaire, comme à Moscou, fourni pour tous, sans aucun contrôle de la température, ce qui le rend très pénible en cette demi-saison. C’est la milice qui frappe à la porte pour vérifier nos papiers et se toucher une prime au passage. Le prix de la tranquillité.

One Reply to “Mes premières impressions et expériences de ma vie à Tachkent, en Ouzbékistan”

  • Moi

    Je suis encore plus verte de ne pas être venue (bêtement, d’ailleurs parce que j’aurais eu le temps, à l’époque), parce que c’était tellement l’occasion de découvrir un pays improbable, dont personne n’a jamais entendu parler autrement qu’en essayant de retenir son emplacement sur une carte de géo, au milieu des autres pays en « stan », à la veille d’un contrôle !

    On y retournera ensemble ?

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